lundi 23 juillet 2007

LA RÉFORME PÉNITENTIAIRE : L’AUTRE DÉFI...

Le terme ‘’régime pénitentiaire ou carcéral’’ s’entendde la condition des personnes emprisonnées ouincarcérées à la suite d’une condamnation prononcée par l’autorité judiciaire compétente pour infraction.Tout détenu doit être traité avec le respect dû à la dignité et à la valeur inhérentes à l’être humain. Les prisons doivent s’acquitter de leurs responsabilités conformément aux objectifs sociaux de l’Etat et aux responsabilités fondamentales qui lui incombent pour promouvoir le bien-être etl’épanouissement de tous les membres de la société.

Les normes internationales en matière de détention imposent un certain nombre de règles relatives à laprison. Le droit haïtien fournit les règles minima nécessaires à la protection des droits des prisonniers. Aussi, la constitution dispose-t-elle : ‘’ le régime des prisons doit répondre aux normes attachées aurespect de la dignité humaine selon la loi sur la matière’’ (art.51). Ces principes sont-ils vraiment respectés et dans quel état se trouvent nos centres de détention ?Le problème ainsi posé est important et d’actualité. La situation s’est détériorée à travers tout le pays et les causes sont variées.

Les établissements pénitentiaires sont prêts à exploser compte tenu du manque chronique de place etd’infrastructures. La population carcérale a augmenté mais ni les locaux, ni l’institution ne sont adaptés à l’évolution de la nouvelle génération de condamnés, pour la plupart, très dangereux. Le profil des détenus a changé. Il sont d’horizons divers : trafiquants de drogue, auteurs d’enlèvements, criminels expulsés des Etats-Unis et du Canada, sans oublier, les puissants chefs de gang récemment épinglés. La vétusté des bâtiments, l’absence de soins médicaux, la violence entre détenus, l’inadéquation de la nourriture et le développement des maladies sexuellement transmissibles suite à des viols et les évasions répétées doivent être soulignés. Le dysfonctionnement du système judiciaire favorise également la surpopulation carcérale. Cinquante-quatre personnes dans une cellule dépourvue de lits et d’installations sanitaires.

Une pièce de quatres mètres carrés, à peine aérée, dégageant une chaleur d’enfer et une odeur nauséabonde. Seuls quelques-uns arrivent à s’allonger pour dormir. Les autres restent debout ou recroquevillés dans un coin, attendant le lever du jour. Dans une autre cellule, les détenus se couchent par relais, certains dorment le matin, d’autres, le soir. Nous pensons que cela doit interpeller des consciences. Il ne faut pas dire la prison c’est pour les autres car on ne sait jamais... Nous risquons de voir, sous peu, notre système carcéral s’effondrer comme un château de cartes si rien n’est fait dans l’immédiat. Un plan de redressement serait naturellement souhaité même si nous doutons de la volonté réelle des responsables de l’Etat pour améliorer les choses. En Haïti, la politique de l’autruche reste une constante, et c’est très désolant. S’occuper des prisons est une urgence républicaine.

Certains évoquent la nécessité d’une loi pénitentiaire mais de même ‘’qu’on ne change pas la société par décret’’, nous sommes persuadé qu’on ne changera pas les prisons par la seule loi. Car la situation actuelle montre que la majorité des problèmes s’explique non pas en raison de l’application des règlements existants, mais par l’inapplication de ces règlements, confrontée à l’épreuve des faits. La vie dans les centres carcéraux haïtiens est une véritable monotonie, les détenus sont en commun dejour et de nuit, ce qui donne lieu à des abus regrettables : promiscuité odieuse, corruption morale et physique, constitution de véritables associations de malfaiteurs, etc.…On n’a pas besoin d’être grand clerc pour comprendre que la formation professionnelle des délinquants peut contribuer directement à leur rééducation, mais là nous sommes en train de rêver. S’il y a beaucoup à faire pour améliorer les conditions de détention, nous estimons que priorité doit être donnée au désengorgement des maisons d’arrêt, dont la situation est aujourd’hui indigne d’une démocratie. La nécessité d’effectuer un véritable audit de la situation est impérieuse mais il reste à savoir lequel de nos dirigeants sera assez courageux pour le lancer.

Heidi FORTUNÉ
Magistrat,
Juge d’instruction
Cap-Haïtien, Haïti
Ce 15 juillet 2007

1 commentaire:

Guidou a dit…

Cher Me Fortuné
Que pensez-vous de l'aide internationale en matiere de gestion penitenciaire dans votre pays? Percevez-vous des changements et amélioration ? En particulier, les consultants canadiens, dans le cadre de la MINUSTAH, font-il une contribution significative ?

Jean-Yves Roy, Montréal

jean_ys@hotmail.com