jeudi 6 novembre 2014

QUI EST LE JUGE D’INSTRUCTION?



QUI EST LE JUGE D’INSTRUCTION?

On lui prête le plus souvent, et de manière expéditive, des qualificatifs exagérés qui dépassent la mesure. Quand il  n’est pas le personnage le plus puissant de la République suscitant la crainte ou l’appréhension, il est le responsable de tous les maux du système judiciaire, et sa tête est mise à prix comme un vulgaire criminel qui dérange la société. Tantôt vénéré, tantôt décrié, le personnage fait objet, depuis toujours, d’âpres discussions allant d’opinions favorables aux critiques les plus malveillantes…selon les intérêts. Bousculé parfois, critiqué toujours et toujours par les mêmes, il est encore debout. Mais qui est donc véritablement le Juge d’Instruction ?

Le juge d’instruction est un magistrat du siège du Tribunal de Première Instance. À la différence d’un magistrat du parquet, il est indépendant, c’est-à-dire que sa carrière ne dépend pas du ministre de la justice et qu’il n’est pas soumis à un supérieur hiérarchique qui pourrait lui donner des instructions dans les dossiers qu’il instruit. Le juge d’instruction ne peut pas s’autosaisir d’une affaire. Il est saisi soit par le Commissaire du Gouvernement, soit par une victime dont le dossier a été classé ou est resté sans réponse du parquet (plainte avec constitution de partie civile), soit par un jugement du tribunal correctionnel ou un arrêt de renvoi.

L’instruction est obligatoire en matière criminelle. Aucune affaire ne peut être renvoyée devant le tribunal criminel ou une Cour d’Assises sans une instruction préalable. Le juge d’instruction est aussi saisi des affaires correctionnelles (concernant des délits) graves et complexes : abus de confiance, escroquerie et autres délinquances économiques et financières. Une fois saisi, le juge d’instruction procède à tous les actes d’information qu’il estime utiles à la manifestation de la vérité. Il instruit à charge et à décharge. Il effectue lui même certains actes d’instruction, avec l’aide de son greffier : interrogatoires, auditions de victimes et de témoins, confrontations, transports sur les lieux, reconstitutions, perquisitions. Ces actes sont effectués en présence du Commissaire du Gouvernement, des avocats des personnes mises en examen ou des parties civiles.

Le juge d’instruction peut aussi déléguer les actes d’enquête à certains officiers de police judiciaire. Il décerne alors une commission rogatoire en demandant d’effectuer certains actes dont il doit contrôler et vérifier l’exécution. Lorsqu’une question technique ou scientifique se pose, il peut ordonner une expertise. Pour l’instruction d’un dossier criminel, le juge d’instruction doit solliciter  notamment un rapport psychiatrique et psychologique pour recueillir des éléments sur la personnalité du mis en examen.
Le juge d’instruction procède à ces différents actes soit de sa propre initiative soit à la demande du Commissaire du Gouvernement ou des avocats des parties (mis en examen, partie civile). Il doit établir si les faits dont il est saisi peuvent constituer une infraction. Il peut mettre en examen une personne lorsqu’il existe à son encontre des indices graves ou concordants d’avoir participé aux faits. Après la mise en examen, le juge d’instruction peut imposer à la personne des obligations ou des restrictions par un contrôle judiciaire et peut prendre, à lui seul, la décision de placement en détention.

Le juge d’instruction assure donc un rôle de directeur d’enquête mais il est aussi le garant du principe du contradictoire. Il exerce des fonctions juridictionnelles : il peut accepter ou refuser une demande d’actes ou la restitution d’un objet saisi et peut placer sous contrôle judiciaire un mis en examen. À la fin du dossier, il examine, après avis du Commissaire du Gouvernement dont il n’est pas lié, s’il existe contre les personnes mises en examen des charges suffisantes pour les renvoyer devant une juridiction pénale (tribunal correctionnel ou cour d’assises). Dans le cas contraire, il rend une ordonnance de non lieu. Ses décisions peuvent faire objet d’appel.

Donc, contrairement à ce que l’on tente de faire croire, le juge d’instruction, avec ses spécificités, est adapté aux exigences libérales évolutives de la société. Non seulement il garantit l’égalité des armes entre le Parquet, la défense et les parties civiles mais son indépendance statutaire, constitutionnellement garantie, associée à une disparition progressive de l'inquisitoire vers le seul lieu d'accusatoire avant jugement  le rend indispensable à l’équilibre de la procédure pénale et au principe de la présomption d’innocence. Il est, pour ainsi dire, le pivot et la clé de voûte des garanties procédurales.

Somme toute, le juge d’instruction, malgré tous ses pouvoirs, est et reste avant tout un être vulnérable qui doit, dans sa solitude et son isolement, veiller à sa sécurité personnelle et celle de ses proches dans la gestion de certains dossiers à risques tels : kidnapping, trafic de la drogue, crime financier… où de gros intérêts sont en jeu et où de grosses têtes sont également impliquées. Et les invasions à répétition dans les prisons n’arrangent pas sa situation. Il prend et court des risques énormes notamment en menant des enquêtes judiciaires dans sa propre bagnole, celle-là même qui emmène sa famille à l’église et ses enfants à l’école ; en refusant de troquer son intégrité et son honnêteté contre de l’argent ; en rendant, au regard de la loi et sans parti pris, des ordonnances au nom de la République pour se voir ensuite s’exposer au chantage et à toutes sortes de pressions. Voilà ce qu’est en fait la réalité du Magistrat Instructeur haïtien… mais qui s’en soucie ?

Heidi FORTUNÉ
Magistrat, Juge d’Instruction
Cap-Haïtien, Haïti, ce 06 novembre 2014


mardi 16 septembre 2014

ENTRE FIERTÉ ET REPROCHES



ENTRE FIERTÉ ET REPROCHES

En général, la Justice reste le rempart sur lequel viennent briser les velléités de manipulation et d’abus en tous genres...surtout dans les pays où la représentativité civile et citoyenne est embryonnaire. Qui mieux que les Magistrats doit garantir le fonctionnement optimal de la machine judiciaire pour calmer les pressions et garantir l’équité ? Et c’est là que le constat amer est fait puisqu’en Haïti, il y a un réel déficit dans la dimension éthique du Pouvoir Judiciaire. Un Juge doit inspirer considération et respect,  jouir d’une parfaite honorabilité en tout temps et en tout lieu. En fait, c’est le contraire qui est vrai tant les Magistrats sortent de leur rôle, abandonnant leurs prérogatives au profit des deux autres pouvoirs qui ont réussi à s’emparer des temples que sont les palais de justice.

Le pays dispose d’un code d’instruction criminelle, certes perfectible, mais s’ouvrant sur des avancées relatives… Sauf qu’il est en permanence violé par les Magistrats eux-mêmes qui démontrent à la face du monde que l’Exécutif et le Législatif sont les seuls maitres du jeu. Si on peut penser que les Magistrats qui redoutent la présence subtile des mains des deux autres pouvoirs dans le processus de leur avancement observent quelque prudence dans le traitement de dossiers dits sensibles, rien ne justifie leur apathie ou leur renoncement devant ce qui semble évident. À croire que la satisfaction de certains besoins personnels  et égoïstes demeure la seule vraie motivation. Mais attention ! La concussion n’est pas loin en troquant des décisions contre un bien matériel.

Magistrats, reprenez-vous ! Ne soyez plus aux ordres ni corrompus ! Il vous faut absolument redonner à la justice, avec la volonté d’aller vers les standards, sa place véritable comme Pouvoir devant jouer un rôle prépondérant dans le développement et la sauvegarde de la démocratie et de l’État de droit. Votre mission est d’appliquer la loi envers et contre tous, de veiller à la bonne exécution des procédures du droit, de contrôler les actes illégaux et toutes choses qui ne favorisent pas un système judiciaire équitable, efficace et accessible. Bon nombre d’entre vous n’accomplissent pas cette tâche essentielle qui leur est dévolue et ne sont pas capable de  s’imposer à l’Exécutif et au Législatif, comme l’exige le principe de la séparation des pouvoirs. Si et seulement si vous saviez ce qu’est l’honneur d’être Magistrat !

On peut toujours insinuer que vous êtes trop rigides, trop légalistes. Mais on ne devra jamais vous reprocher d’être corrompus ou encore questionner votre moralité ni mettre en doute votre compétence et votre impartialité car pour mériter l’honneur et la fierté de la nation, vous devez arborer les principes rationnels d’exigence et de devoir. Le sacerdoce qui est le vôtre vous condamne dans la conception de la justice comme pilier de la confiance dans la société pour garantir aux citoyens que leur cause sera entendue par un Juge au service du droit et non de l’autorité qui l’a nommé et le rémunère. Pour que les citoyens n’aient plus ce sentiment partagé selon lequel le système des lois qui règle les droits et les devoirs des personnes n’est pas applicable, qu’ils puissent plutôt observer que le règne de la loi n’est pas la loi du Juge mais celle de la nation. Lorsque s’amoncellent les périodes du déclin, on peut mesurer la capacité d’un État à pouvoir rebondir à la foi qu’on accorde aux chantres de l’intégrité et du respect…Et la Justice, en tant que pouvoir, est un de ceux-là.

Au-delà de tout ce qui précède, la Magistrature haïtienne a besoin d’un grand toilettage afin de mettre un terme à la proximité insidieuse et sournoise qui plombe son bon fonctionnement et à la corruption évidente de certains individus malhonnêtes inspirés seulement par l’appât du gain facile. Nous ne sommes pas un donneur de leçons mais nous pensons qu’il est de notre devoir de dénoncer, fût-ce au péril de notre vie, certaines pratiques qui ne cadrent pas avec la profession mais qui malheureusement s’exécutent avec la complicité et le libre consentement de ceux qui doivent sanctionner de telles dérives.

L’heure est venue en Haïti pour tous les Magistrats et tous les acteurs du droit d’inscrire leurs noms au fronton de la République, en abordant les différentes affaires sous l’angle strict du droit qui ne s’accommode pas d’arbitraire car il vient toujours un moment particulier où on fait son bilan et  établit ses responsabilités devant l’Histoire. Il est temps que le Magistrat haïtien fasse son autocritique et opère sa mue… parce qu’avec la mondialisation, les instances de jugements se sont multipliées et il sera peut-être hasardeux de dire qu’on ne savait pas. Nous avons l’obligation de sortir notre pays du piège des basses manœuvres et le devoir de mettre les pouvoirs Exécutif et Législatif face à leurs responsabilités. Le monde entier a le regard rivé sur la justice haïtienne concernant certains dossiers brûlants d’actualité tels : Jean-Claude Duvalier / Jean-Bertrand Aristide / Famille présidentielle/ Clifford Brandt / Woodly Éthéard alias Sonson la familia. La Magistrature joue son image et sa crédibilité. Collègues Magistrats, la balle est dans votre camp. Il revient à vous et à vous seuls de dire le mot du droit. Mais Sachez, en ayant toujours en tête, que l’Histoire retiendra toujours ; que le choix entre fierté et reproches est un appel de la conscience et que… «  Être magistrat, c’est à la fois un honneur et une responsabilité. »

Heidi FORTUNÉ
Magistrat, Juge d’Instruction,
Cap-Haïtien, Haïti, ce 16 septembre 2014


dimanche 14 septembre 2014

ÉCHO JUDICIAIRE





ÉCHO JUDICIAIRE

Parce que la justice est un des piliers de la démocratie ; parce qu’elle encadre la vie du corps social et parce qu’elle est complexe et évolue sans cesse ; nous vous invitons à visiter le blog http://heidifortune.blogspot.com pour découvrir la Justice autrement.

Destiné à rapprocher les haïtiens du monde de la Justice et du Droit, ce site d’information est exceptionnel par la richesse de son contenu, unique dans sa forme et novatrice dans son approche. Il présente la justice au fil des jours sous toutes ses facettes, de façon critique et pédagogique et se positionne comme la première plateforme de connaissance sur la justice haïtienne.

C’est un outil de partage pour le citoyen d’abord qui peut inviter des amis à le consulter. Pour l’enseignant ensuite qui peut télécharger des fiches pour des présentations aux étudiants. Pour le professionnel enfin qui peut l’utiliser lors des conférences publiques.

Outil de diffusion, d’information, de communication, de valorisation et de promotion, http://heidifortune.blogspot.com permettra à chaque haïtien de mieux comprendre le fonctionnement de la Justice et l’évolution du droit en Haïti.

Pour que la Justice haïtienne soit mieux connue et mieux reconnue…cliquez tout de suite sur http://heidifortune.blogspot.com



Heidi FORTUNÉ
Magistrat, Juge d’Instruction,
Cap-Haïtien, Haïti, ce 14 septembre 2014



L'HOMME QUI A FAIT LA DIFFÉRENCE EN 2013

mercredi 7 août 2013

Juge Heidi Fortuné : L’HOMME QUI A FAIT LA DIFFÉRENCE EN 2013 (Texte de Cyrus Sibert).

L'HOMME QUI A FAIT LA DIFFÉRENCE EN 2013
 
Le Juge d'Instruction Prés le Tribunal de Première Instance du Cap-Haitien Me Heidi FORTUNÉ a été honoré ce mercredi 07 août 2013 à l'Hôtel ''Le Plaza'' à Port-au-Prince par l'Association ''SOS Liberté'' pour sa bravoure, sa compétence et son sérieux. Une plaque ''Honneur et Mérite'' dénommée ''Prix Roc Cadet 2013''a été remise en la circonstance au Magistrat Instructeur du Cap-Haitien par l'actuel secrétaire général de ''SOS Liberté'' Me Gervais Charles pour montrer à plus d'un qu'il n'y a pas seulement de mauvaises choses dans la société haïtienne, mais qu'il y a aussi des gens qui peuvent apporter un nouveau souffle par leur comportement. …Heidi FORTUNÉ est incontestablement le meilleur Juge d'Instruction haïtien a déclaré le secrétaire général de ladite association dans son discours de circonstance.

A rappeler que ''SOS Liberté'' est un organisme de défense de Droits Humains fondé par un groupe d'avocats et de journalistes dans le but d'aider la population à faire confiance à la justice. Depuis six ans, ''SOS Liberté'' récompense des personnalités qui font honneur à la société haïtienne, en leur attribuant le prix ''Roc CADET'' en mémoire de son premier détenteur en 2006, victime du séisme du 12 janvier 2010.

Le choix de Me Heidi FORTUNÉ a été fait par ''SOS Liberté'' de concert avec le Barreau du Cap-Haitien et des Magistrats de Port-au-Prince. Cette distinction a donc été attribuée au Juge Heidi FORTUNÉ pour avoir rehaussé, par son honnêteté, son intégrité et sa compétence, l'image de la Magistrature haïtienne.
 
Félicitations à Me Heidi FORTUNÉ, Juge d'Instruction de Cap-Haitien.