dimanche 27 mai 2007

LES MAGISTRATS DU PARQUET SONT-ILS MEMBRES DU POUVOIR EXECUTIF?

La délicate problématique des liens du Commissaire du Gouvernement avec le pouvoir exécutif a déjà fait l’objet de maints savants commentaires.

Il est tout d’abord certain que, de quelque pouvoir dont ils soient l’organe, les membres du parquet agissent toujours comme Magistrats, membres du pouvoir judiciaire. C’est mal poser le problème que se demander si les magistrats du parquet sont membres du pouvoir exécutif. Un pouvoir n’a pas de « membres », mais ce qu’il est convenu d’appeler des « organes ».

Les Officiers du Ministère Public agissent comme organes du pouvoir exécutif lorsqu’ils exercent l’action publique ou exécutent les décisions judiciaires, comme organes du pouvoir judiciaire lorsqu’ils assistent le juge et tentent de l’éclairer sur l’interprétation de la loi et sur son application à telle ou telle cause. Ils participent à l’administration de la justice et sont investis d’un pouvoir d’appréciation, tant dans l’exercice des poursuites que dans les avis qu’ils expriment, dans une indépendance qui ne peut être mise en question par aucune autorité politique ou disciplinaire, sous la seule réserve du ministre de la justice d’ordonner des poursuites.

C’est uniquement lorsque les membres du parquet agissent comme organes du pouvoir exécutif qu’ils se trouvent sous l’autorité et la surveillance de leur ministre de tutelle. Cependant, l’autorité de ce dernier ne lui permet pas de les interdire de mettre en mouvement l’action publique, toutefois, il peut les enjoindre de le faire, dans la mesure compatible avec les respects des pouvoirs propres que ces magistrats
tiennent directement de la loi, d’autant que les missions du Commissaire du Gouvernement et ses Substituts sont prévues dans le code d’instruction criminelle.

Naturellement, le Garde des Sceaux de la république peut adresser aux magistrats du parquet des instructions générales dans le but d’assurer l’application de la loi, de coordonner la politique criminelle, d’organiser la défense de l’ordre public. Il est, en effet, responsable de la poursuite de ces objectifs devant le Parlement et ne pourra agir efficacement dans ces domaines qu’avec le concours de ces magistrats qui assurent, seuls, dans leur ressort, la direction des activités des parquets.

Il est donc faux de prétendre que les Magistrats du Parquet appartiennent au pouvoir exécutif ou se situent constitutionnellement dans la hiérarchie du pouvoir exécutif. Le fait qu’ils soient nommés et puissent être révoqués par l’exécutif ne suffit manifestement pas à justifier de telles affirmations. Les Juges aussi sont nommés par l’Exécutif. La révocation d’un magistrat du parquet ne doit avoir lieu sans justification. Et, durant l’exercice de sa fonction, rien ne permet de dire qu’ils appartiennent au pouvoir exécutif ni qu’ils lui sont subordonnés car
la constitution et la loi les placent sans équivoque à l’intérieur même du pouvoir judiciaire.


Heidi FORTUNÉ
Magistrat, Juge d’Instruction
Cap-Haïtien, Haïti

Ce 27 Mai 2007