DISCOURS
DU MAGISTRAT HEIDI FORTUNÉ, MINISTRE DE LA JUSTICE ET DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE,
À L’OCCASION DE LA RÉOUVERTURE DES COURS ET TRIBUNAUX DE LA RÉPUBLIQUE LE 02
OCTOBRE 2017.
Monsieur le Président de la République,
Monsieur le Président de l'Assemblée
Nationale,
Monsieur le Président du Conseil Supérieur
du Pouvoir Judiciaire et de la Cour de Cassation,
Monsieur le Premier Ministre,
Mesdames, Messieurs les
Ministres,
Mesdames, Messieurs les Président
et Membres de la Cour Supérieur des Comptes et du Contentieux Administratif,
Mesdames, Messieurs les
Ambassadeurs et Chefs de Missions Diplomatiques,
Mesdames, Messieurs les
Magistrats assis et debout,
Monsieur le Président des
Barreaux d'Haïti et Bâtonnier de l'Ordre du Barreau de Port-au-Prince,
Messieurs les Anciens Ministres
de la Justice et de la Sécurité Publique ,
Messieurs les Anciens Bâtonniers,
Monsieur le Directeur de la
Police Nationale d'Haïti,
Mesdames, Messieurs les Avocats,
Messieurs les Recteurs, Doyens et
Professeurs des Universités,
Messieurs les Dignitaires
Religieux et Coutumiers,
Mesdames, Messieurs les
Greffiers, Commis-parquet, et Huissiers de Justice,
Mesdames, Messieurs les Officiers
Ministériels et Auxiliaires de justice,
Mesdames, Messieurs, les représentants
des Organismes des Droits Humains internationaux et nationaux,
Mesdames, Messieurs les représentants
des organes de la presse parlée, écrite et télévisée,
Distingués (es) invités (es),
Mesdames, Messieurs,
C’est avec un sentiment de
satisfaction profonde nuancée malheureusement d’une certaine déception que je
prends la parole ce matin, en ma qualité de Garde des Sceaux de la République,
à l’occasion de ce double évènement marqué par la réouverture officielle de nos Cours et tribunaux,
et aussi le démarrage du nouvel exercice fiscal pour l’année 2017-2018. En dépit
de nos divergences exprimées, à tort ou à raison, à travers des prises de
position ayant des incidences majeures sur la vie politique, sociale et
économique du pays, nous, représentants des trois pouvoirs dont l’existence
même donne à notre État le statut d’État démocratique, nous voici réunis dans
le dessein d’accomplir une mission sacro-sainte confiée par notre constitution
de 1987 amendée.
Ce sentiment de
satisfaction grandement éprouvée, auquel je fais allusion s’explique, au prime
abord, par les efforts consentis par le gouvernement en général ainsi que le
ministère que j’ai l’honneur de diriger, en particulier, à travers un programme
conçu, bien aiguisé et en cours d’exécution bien entendu, non seulement à mettre en place des mécanismes
pouvant renforcer davantage la capacité des différentes institutions étatiques, mais encore à créer ou
à rendre possible l’existence de
certaines structures afin qu’elles puissent répondre avec célérité et efficacité
aux besoins de la population.
Qu’il me soit
permis ensuite d’évoquer avec une franche modestie et sans risque d’être
démenti l’application saine et méthodique du plan de travail que nous avons
nous-mêmes (mon équipe et moi) élaboré minutieusement à mon département, eu
égard aux vœux du Président de la République, Son Excellence Jovenel MOISE et à
ceux du Chef du Gouvernement, Son Excellence, Dr JacK Guy LAFONTANT, exprimés
dans la lettre de cadrage adressée aux titulaires des différents ministères, et
qui se focalisent sur la concrétisation
d’un rêve cher caressé par d’honnêtes
citoyens, paisibles, respectueux des principes : il s’agit de voir Haïti
se transformer en un véritable ÉTAT DE DROIT, État où il ferait bon vivre, État
au sein duquel les "hors-la- loi" n’auraient pas leur place.
Toujours dans le
cadre de la poursuite des objectifs définis dans le plan de travail du
ministère, on a abordé de front le problème de la corruption qui ronge notre
système judiciaire, ce qui a débouché sur la poursuite pénale des présumés
auteurs ou co-auteurs ou complices, qu’ils soient magistrats, fonctionnaires ou
grands commis de l’État, avec comme corollaire la révocation ou toute autre forme d’expulsion de ces derniers,
selon nos lois régissant cette matière. De plus, des instructions en termes
clairs et précis sont passées aux agents du pouvoir que je représente, qui sont
dans le judiciaire, dans le cadre d’une nouvelle politique de prévention et de
répression contre le phénomène de la corruption. Que je vous dise en passant
que durant ces deux dernières années judiciaires, certains Parquetiers ont été
inefficaces. ils n'ont produit aucun réquisitoire notamment au niveau des
Parquets prés les Cours d'Appel et des Tribunaux de première instance. Faut-il
continuer à verser des émoluments pour un travail non fourni? NON! Des mesures
administratives fermes s'imposent, et ce, sans aucune indication de méchanceté.
SINÉCURE ET CORRUPTION = ZÉRO TOLÉRANCE
Des mesures ont été
prises également pour combattre un autre phénomène qualifié de dépossession
violente et arbitraire en matière immobilière, tendant à mettre en péril la
sécurité foncière. À cet effet, par arrêté présidentiel, la Brigade d'Intervention
Contre l’Insécurité Foncière (BRICIF) fut créée, ce, sur initiative du
ministère dont je suis le titulaire. Sa mission consiste à faire respecter le
droit de propriété consacré non
seulement par notre constitution et nos lois en vigueur mais aussi par les
instruments internationaux que nous
avons ratifiés. Au nom de la vérité, cette brigade se base présentement dans les locaux du Ministère de la Justice et
de la Sécurité Publique et intervient dans des cas identifiés à Port-au-Prince
ainsi que dans les autres communes
avoisinantes. Elle s’étendra sur le moyen terme au niveau des autres
juridictions du pays, affectées par ce phénomène, afin de parvenir à son
éradication. SÉCURITÉ FONCIÈRE = INVESTISSEMENT = CRÉATION D’EMPLOI
Quant à l’impunité,
elle constitue un défi majeur. Une lecture rationnelle de ce phénomène requiert
pour sa dissuasion l’implication de chacun, chacune aussi bien dans son statut
que dans sa sphère d’action. Tout le monde est exposé à ce phénomène, tout le
monde en peut sortir victime si on n’est pas prêt à se donner à fond comme par
exemple en dénonçant les auteurs des infractions ou en acceptant de déposer
contr’eux. Même les magistrats dans leurs agissements tendant à la favoriser
n’y doivent être épargnés. Aux parlementaires, je dis : "Immunité
n’est pas impunité". À ce titre, un
programme de sensibilisation et de motivation s’exécute à travers de brefs
messages publicitaires encourageant les citoyens(es) à s’acquitter de leurs
devoirs civiques aussi bien que d’une obligation imposée par la loi. NON À
L’IMPUNITÉ = ÉTAT DE DROIT = SOCIÉTÉ DÉMOCRATIQUE
Je ne m’arrête pas
là. Permettez maintenant que je sorte de mon tiroir un "gros
dossier", celui de la détention préventive trop prolongée. On en parlait
assez souvent sans envisager pour le
moins de vraies ébauches de solution. Ainsi, pour pallier ce problème, il a été
conçu, puis mis en place une vaste opération baptisée sous le nom de Plan Thémis. Ce plan a permis et
permettra encore la tenue régulière d’audiences spéciales correctionnelles et
criminelles en vue de réduire à néant le nombre surélevé de personnes en
attente de connaitre leur sort. Au cours de ces audiences, le respect des
droits du ou de la prévenu(e) ainsi que de l’accusé(e) est de règle. En termes
de résultat que cela a donné, je vous prie humblement de consulter les archives
des Tribunaux de Première Instance de Port-au-Prince et vous verrez! L’on est
en droit de se demander aujourd’hui : "Est-ce qu’on ne serait pas parvenu
à un très faible pourcentage de personnes en situation de détention préventive
trop prolongée, n’étaient-ce les arrêts de travail consécutifs et même parfois
sans interruption observés par le personnel judiciaire (greffiers, huissiers,
commis-parquet et juges) dans presque toutes les juridictions du pays" ?
De ce qui précède, il résulte que le Plan Thémis reste et demeure un palliatif convaincant
au problème de la détention préventive trop prolongée.
Parlant encore de ce phénomène, s’il est une chose qui
vienne assombrir le tableau que j’ai le privilège de vous présenter c’est
l’arrêt de travail illimité par des personnes jouant un rôle clé dans le
système, en quête de leurs satisfactions personnelles, ne prenant pas en compte
la situation des "oubliés(es) de la prison". Cela m’affecte au plus
profond de mon être. Voilà la déception dont je vous ai parlé au début de mon
allocution. Ce pénible constat devrait interpeller
plus d’un à faire un plaidoyer en leur faveur pour que leur sort soit allégé à
l’avenir par l’adoption d’une autre manière de faire tel qu’en cédant, par
exemple, le minimum. Le droit à la grève, oui mais l’exercer comme on veut est
une violation du Droit.
Dans une perspective de recherche de compromis, des
discussions furent engagées tantôt avec les associations des greffiers au
ministère, tantôt avec le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire au palais
national. Suite à ces différents pourparlers des résolutions sont
adoptées :
Pour les greffiers, huissiers et commis-parquet
Il a été décidé d’améliorer leurs conditions de
travail en procédant de cette manière :
1-Un ajustement salarial de cinq mille (5000Gdes)
gourdes sera opéré à partir de ce mois.
2- Ils seront tous couverts par une police d’assurance
maladie suivant un accord conclu avec l'Office d'Assurance pour Accident du
Travail et Maladie (OFATMA).
3-Pour le prochain exercice 2018-2019, la carte de
débit leur sera octroyée.
4- Des mobiliers et matériels de bureau seront mis à
la disposition des greffiers et des commis-parquet.
5-Les greffiers entreront dans un programme de
formation continue à l’École de la Magistrature (EMA).
Pour les magistrats assis
1-Une indemnité mensuelle à hauteur du tiers (1/3) du
salaire leur sera accordée. Elle sera effective dès ce mois.
2- Dix-neuf (19) véhicules seront distribués à tous
les cabinets d’instruction, à raison d’un (1) véhicule par juridiction.
3-Quatre cent cinq (405) motocyclettes à distribuer
également à tous les tribunaux, à raison de deux (2) par tribunal de première
instance et de deux(2) par tribunal de paix.
4-La remise des commissions présidentielles dans le
cadre de renouvellement de mandat pour
certains juges ou de promotion pour d’autres sera faite cette semaine.
5-Désormais, le Conseil Supérieur du Pouvoir
Judiciaire participera au processus de préparation du budget.
6-La promesse d’honorer une dette de trente neuf
millions (39,000.000 Gdes) de gourdes, contractée par le CSPJ pour ses besoins
est à lui faite.
7-En ce qui concerne le transfert de compétence du
personnel judiciaire au CSPJ, cela
est en passe de discussion.
8-L’engagement est pris pour faire, à moyen terme,
réparer les locaux abritant les tribunaux et l’acquisition de mobiliers et
matériels de bureau à leur compte.
Voilà l’accord trouvé entre les deux pouvoirs de notre
État.
Espérons qu’avec ces résolutions, les délais fixés
dans nos codes seront pour le moins respectés dans le traitement des dossiers,
qu’il y aura un nombre insignifiant de gens en situation de détention
préventive trop prolongée.
Espérons que par ces résolutions qui constitueraient
le point de départ d’un renouveau du système le Droit triomphera toujours à
travers une distribution saine et équitable de la Justice.
Tels sont les vœux que je puisse formuler à vous tous
qui avez un rôle à jouer dans le système judiciaire haïtien.
BONNE ANNÉE JUDICIAIRE ! BONNE ANNÉE FISCALE !
Que Dieu
bénisse Haïti.
Je
m'appelle Heidi FORTUNÉ, je suis le Ministre de la Justice et de la Sécurité
Publique.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire